Dans le cadre de la célébration du 150ème anniversaire de la première exposition impressionniste initiée par le musée d’Orsay, le musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon accueillera du 24 février au 2 juin 2024, le fragment central du Déjeuner sur l’herbe, de Claude Monet, réalisé entre 1865-66.
Le tableau a été découpé en trois fragments par l’artiste en 1884 (le troisième morceau est aujourd’hui disparu), et la composition ainsi créée, met en scène quatre personnages installés dans une clairière. Trois sont reconnaissables. On y remarque aux côtés de Camille Doncieux, la compagne de l’artiste, et Frédéric Bazille, le camarade et peintre, un homme assis comme s’il était le maître de cérémonie. Il présente certains traits particuliers qui pourraient être ceux de Gustave Courbet : cheveux, barbe et yeux noirs, embonpoint, charisme. Ces caractéristiques physiques sont bien connues ; l’artiste multiplie depuis ses débuts, les autoportraits, et se forge une image publique qui fait de lui l’un des peintres les plus caricaturés du XIXe siècle.
L’effigie de l’artiste, ainsi peut-être revisitée par Monet, révèle le « personnage Courbet », imposant, mais comme rajeuni par la fréquentation de ces nouveaux camarades.
Car Claude Monet (1840-1926) et Gustave Courbet (1819-1877) se fréquentent à l’époque de la réalisation de l’œuvre : en 1866, ils se retrouvent à Chailly aux côtés de Frédéric Bazille. Là, Monet entreprend son monumental Déjeuner sur l’herbe qu’il destine au Salon et sur lequel Courbet porte un œil attentif. Les échanges sont réciproques entre ces deux artistes de générations différentes mais qui se rejoignent sur certains points. Tout comme Monet pour son Déjeuner sur l’herbe, Courbet, pour ses toiles, pose son chevalet en plein air et recompose en atelier. Tous deux travaillent également des motifs en série, comme pour Le puits noir de Courbet dont le musée de Besançon conserve une version. Le premier grand modèle du Déjeuner sur l’herbe n’est-il pas également le monumental Repas de chasse de Courbet ? (1858, Wallraf-Richatz Museum). On y retrouve les figures puissantes, la scène de genre élevée au rang d’événement épique, l’attention portée au végétal et à la nature, et une même généreuse nature morte étalée au premier plan.
Le musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon est heureux de pouvoir offrir à ses visiteurs et visiteuses, grâce à la générosité du musée d’Orsay, un nouveau regard sur le Franc-Comtois Courbet, ami, camarade, soutien, d’une jeune génération qui s’apprête à le suivre dans la remise en cause de l’académisme, le rejet des institutions et la liberté, et à célébrer, avec cette œuvre aux couleurs franches, vives, à la lumière pleine d’éclat, à l’audace incroyable, l’Impressionnisme dont l’inventivité continue à nous enchanter.