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BAP | Bon à prendre | 20
Le dauphin : un animal sans doute bien mystérieux pour un gallo-romain habitant une zone tellurienne comme la Franche-Comté ! Pourtant, si l’on y prête attention, on le rencontre ici et là, même dans des objets que seuls les yeux des plus curieux vont croiser dans nos collections. Nous souhaitions aujourd’hui partager la délicatesse apportée à cette petite bague en or provenant du Collège Lumière. L’esthétisme des différentes sinuosités offertes par le corps du dauphin a été choisie par la personne aisée qui l’a jadis portée à son doigt au Ier siècle de notre ère. Sur une minuscule pâte de verre orangée, deux dauphins se positionnent queues en l’air et têtes en bas avec des corps fuselés et forment les bras d’une lyre. La caisse de cette même lyre est formée d’un petit chien couché en boule. On mélange ici dans une très délicate et discrète composition tout en rondeur différents thèmes. Compagnon des dieux romains, Neptune notamment, le dauphin se mélange ici à un a animal qui est plus familier de la mythologie dite celte. La lyre, instrument phare d’Apollon, témoigne de l’enthousiasme d’accueillir cette nouvelle culture en Gaule. Des artisans déjà très spécialisés vont chercher à transcender la matière et braver le minuscule pour arriver à un gracieux jeu de courbes et contrecourbes qui évoque presque l’art contemporain. Reste à souligner comme il est plaisant de se laisser surprendre et de voir notre première impression bousculée en y regardant de plus près !
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Nina Martin, doctorante, Institut des Sciences et Techniques de l’Antiquité, Université de Franche-Comté.
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Intaille MBAA inv. A.2005.8.16
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BAP | Bon à prendre | 19
La montée des couleurs
Le confinement à domicile que nous observons actuellement pour préserver notre santé, celles de nos proches et de nos concitoyens a lieu à l’arrivée du printemps en Europe. Dans le calendrier révolutionnaire, on serait en germinal depuis le 21 mars jusqu’au 19 avril, temps de la sève, des fleurs dans les arbres, des primevères et des jonquilles. Ceux qui habitent dans les petites villes, les villages et les fermes, gens à
l’écart de la vie urbaine, voient la saison s’accomplir dans leur jardin et, depuis leurs fenêtres, sur les bois et les champs environnants. Ils assistent comme chaque année, d’un peu plus loin, à la montée des couleurs sur le monde. Les autres, devant des rues désertées, des cours vides, des immeubles sous des bouts de ciel, ont la beauté des images pour se souvenir de la stimulante vitalité de la nature à cette
période. Elles sont une promesse de bonheur ; ils se rattraperont quand l’épidémie sera passée. Puissions-nous tous nous rappeler et garder à l’esprit que le paysage
peint le plus précieux, le plus rare, n’est plus qu’un objet si ce qu’il représente, qu’on a tant négligé, gaspillé, abîmé, n’est plus disponible.
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Michel Bernard, écrivain, 27 mars 2020
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En regardant « Les Roches rouges à Anthéor » de Louis Valtat
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BAP | Bon à prendre | 18
Sérendipité sélénite ! En cherchant sur le site pleine-lune.org (il existe !) la date de la prochaine pleine lune, je suis tombé sur la raison de tous nos malheurs : « L’année 2020 verra 13 pleines lunes au total. » Une de trop !
Pis encore, le 8 avril prochain, au milieu de la nuit, c’est une « Super lune » pleine que l’on pourra contempler de nos fenêtres, la plus grosse et la plus lumineuse de l’année. Son œil incrédule s’approchera au plus près pour assister au grand repos de la Terre.
Il n’y avait pas foule non plus au clair de cette Super lune sur le lac volcanique d’Albano, peinte au début du XIXe siècle par un talentueux Flamand gaucher installé à Rome. Aucune trace de civilisation : ni la villa de l’empereur, ni le château du pape, le fameux Castel Gandolfo que surmonte aujourd’hui l’observatoire astronomique du Vatican. Ce petit tableau lunaire, avec ses confins blanchâtres, son arbre immense et ses nuages tranquilles, s’éclaire peu à peu. La lumière du soleil se reflète dans la lune qui se reflète dans les eaux du lac. Petites ombres chinoises en plein contre-jour nocturne, l’homme au chapeau et son mulet chargé (d’avoine ou d’argent ?) sont une allégorie de la méditation à laquelle nous sommes tous désormais conviés.
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Jean-Marc Hovasse, professeur de littérature française, Sorbonne Université, conseiller scientifique de la maison natale de Victor Hugo
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Martin Verstappen (1773-1853), Clair de lune sur le lac d’Albano, huile sur bois.